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Commission Seriti : ni embrouilles, ni magouilles dans l’achat d’armes par l’Afrique du Sud

L’affaire a démarré en 1999 et le rapport de la Commission Seriti vient d’être rendu public ce 21 avril 2016 par le Président Jacob Zuma. Il aura fallu attendre 17 ans pour en arriver à la conclusion angélique qu’acheter et vendre des armes et du matériel militaire est un commerce d’une clarté cristalline entre gens de bien, honnêtes et respectables. Une conclusion que tout le monde ne partage pas, le dernier chapitre du scandale Arms Deal n’est pas clos.

La conclusion du rapport est limpide : aucune fraude, aucune corruption, tout est bien dans le meilleur des mondes possibles. On peut alors se demander pourquoi cette affaire traîne depuis des années, pourquoi elle a valu à Jacob Zuma , alors vice-président d’être démis de ses fonctions par le Président Mbeki , pourquoi le conseiller financier Shabir Shaik a été jugé et condamné à une peine de prison, pourquoi Toni Yengeni, membre de l’Anc, a été reconnu coupable d’avoir accepté une petite ristourne sur l’achat d’une voiture de luxe, pourquoi la compagnie britannique BAE a payé une lourde amende pour fraude et que voulait donc dire la phrase codée « Les lumières brillent sur la Tour Eiffel » sinon que Jacob Zuma acceptait une petite rente à vie de la compagnie française Thomson CSF pour faciliter une transaction juteuse ?

Le contribuable sud-africain qui a largement payé de sa poche ce marché de quelques 50 milliards de dollars devra accepter la conclusion du rapport de la Commission Seriti « Aucune preuve d’une attitude frauduleuse de la part de quiconque n’a été trouvé » et que 17 ans après le lancement de l’appel d’offres pour la modernisation du matériel des Forces armées sud-africaines, il ne peut guère espérer que de nouvelles preuves de corruption, fraudes et malversations soient trouvées. Il doit donc se contenter de la lecture de ce rapport et penser à autre chose.

Sauf que le contribuable en a assez d’être pris pour une vache à lait stupide. Il a déjà beaucoup donné pour la rénovation de la résidence de Nklandla ; il a appris avec stupéfaction que les ministres pouvaient être nommés selon le bon vouloir d’une richissime famille, qui depuis a fait ses valises pour Doha. Ce scandale du Arms Deal, qui n’en serait pas un, a du mal à passer pour une simple liste d’emplettes à faire pour assurer la sécurité de la nation. Et puis, il y a ceux qui ont dénoncé l’affaire depuis le début, Patricia de Lille, l’actuelle maire de la ville du Cap qui était alors élue du parti d’opposition DA, l’Alliance démocratique. Et puis il y a les organisations qui ont dénoncé ces dépenses alors que le pays n’était ni menacé, ni en guerre et les journalistes d’investigation qui se sont penchés sur la question et qui ont soulevé beaucoup de questions dont le rapport Seriti ne fait jamais mention.

Dans un article intitulé Plus de prévarication, moins de vérité et pas de justice, publié le 22 avril sur le site du Daily Maverick, Andrew Feinstein, Paul Holden et Hennie Van Vuuren, reprennent les arguments de leur communiqué de presse fait la veille.http://www.dailymaverick.co.za/arti... Ils rappellent qu’au mois d’août 2014, ils se sont retirés de la Commission d’enquête pour protester de la manière dont elle travaillait. Ils ont alors fait valoir que de nombreux employés de la Commission avaient démissionné pour protester contre la manière dont l’enquête était menée. Deux employés avaient justifié leur démission en accusant la Commission de ne pas vouloir faire une enquête sur l’achat d’armement, mais d’avoir un second agenda qui était de discréditer les critiques du Arms Deal et de blanchir les protagonistes du marché.

La Commission avait refusé d’admettre des documents capitaux comme preuve de malversation. Un de ces documents est le Rapport de Debevoise & Plimpton sur la compagnie d’armement Ferrostaal qui montrait que la compagnie avait versé des millions de rands de pots de vin. Ce refus de la commission avait entraîné la démission de deux avocats.

La Commission avait refusé de permettre à des témoins de témoigner sur des documents qu’ils n’avaient pas eux-mêmes écrits ou des événements auxquels ils n’avaient pas eux-mêmes assistés. Ce qui a eu comme conséquence majeure d’avoir pour témoins de la corruption ceux là mêmes qui avaient payé ou reçu les pots de vin.

Enfin la Commission ne leur avait pas communiqué les documents qu’ils avaient le droit de consulter comme le stipulait leur requête auprès du tribunal. Une attitude qui montrait l’hostilité flagrante de la Commission envers les témoins qui critiquaient ce marché des armes.

Enfin un témoin clé, Shabir Shaik, le conseiller financier de Jacob Zuma, qui en 2006 avait été condamné à quinze ans de prison pour corruption, mais a été libéré pour raisons de santé, n’a pas l’intention de se taire. Témoin de la rencontre entre Jacob Zuma et le représentant de Thomson CSF en Afrique du Sud, il a déclaré que la publication du rapport de la Commission Seriti allait lui permettre de prouver « qu’il n’avait rien fait de mal » et qu’il avait payé pour les autres. Son inculpation à l’époque avait soulevé beaucoup de questions et était apparue comme un écran de fumée pour protéger les vrais coupables.

La publication du rapport qui devrait clore un chapitre peu reluisant de la vie politique sud- africaine n’est pas le point final de cette longue histoire, car comme l’écrivent les trois journalistes d’investigation, A.Feinstein, P Holden et H Van Vuuren « Nous sommes convaincus que ce rapport est une occasion manquée de connaître la vérité. Toutefois ce n’est pas la fin du chemin dans la lutte pour la vérité et la justice, et pour savoir qui est responsable de corruption dans ce marché des armes ».

Rappel http://renapas.rezo.net/spip.php?ar... La très longue histoire du scandale des ventes d’armes à l’Afrique du Sud http://renapas.rezo.net/spip.php?ar... Jacob Zuma : justice et politique http://renapas.rezo.net/spip.php?ar... Appel pour la dissolution de la Commission Seriti

Il faut lire Andrew Feinstein The Shadow Worl Inside the global arms trade Editions Farrar, Straus and Giroux New York 2011

Publié le vendredi 22 avril 2016


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Afrique du Sud

Corruption

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