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Corrompus et corrupteurs, une liaison sud-africaine sans fin

Démêler la pelote des intrigues, magouilles, conflits d’intérêts qui ont mis à sac la trésorerie de l ’Etat sud-africain est la lourde tâche de la Commission Zondo. Lord Hain, un ancien militant anti-apartheid, accuse les banques et les multinationales, d’avoir été complices de ce pillage.

Lord Hain n’a rien perdu de sa combativité militante. Né en 1950 au Kenya, mais élevé en Afrique du Sud, ses parents ont du s’exiler à cause de leurs activités anti-apartheid ; lui–même a rejoint le mouvement anti-apartheid britannique dès ses 19 ans. Devant la commission Zondo, il a dénoncé la complicité de la communauté internationale, en particulier les banques et les multinationales, pour avoir laissé faire le pillage des ressources de l’état sud-africain au détriment de la population dont les espoirs de mieux vivre ont été trahis.

« Ce sont les acteurs internationaux qui aidé des individus corrompus à tirer profit de ce pillage illégal en les autorisant à faire sortir du pays leurs biens mal–acquis, puis à leur retour. Ce sont des acteurs internationaux qui ont offert refuge à ces individus corrompus ».

Il est beaucoup plus facile de dénoncer les corrompus qui très souvent, enivrés par leurs gains, éblouis par la vie de luxe que leur compte en banque bien garni leur offre, persuadés que l’argent et le pouvoir ne font qu’un, finissent par se faire prendre la main dans le sac, alors que ceux qui ont facilité et couvert leur malversations restent bien à l’abri dans les bureaux feutrés des grandes banques et compagnies multinationales.

Les tribunaux sud-africains voient défiler des cohortes d’hommes politiques, de dirigeants d’entreprises, de policiers accusés de détournement d’argent public, de blanchiment d’argent, et parfois même de meurtres, du président de la république au simple conseiller municipal, la corruption est présente partout. Mais qui donc leur a permis d’agir en toute impunité ?

Lord Hain, qui a diligenté une commission d’enquête parlementaire en Grande-Bretagne, a expliqué comment des banques comme HSBC, Standard Chartered et Bank of Baroda ont aidé la famille Gupta, en leur permettant d’ouvrir des comptes pour blanchir et dissimuler l’origine de ce flot d’argent. Sans ces banques les Gupta n’auraient pas réussi à siphonner l’argent de l’Etat sud-africain vers leurs propres comptes . Complices aussi KPMG, le cabinet d’audit qui a validé des factures douteuses, des comptes truqués, Bell Pottinger pour sa scandaleuse campagne sur le capitalisme blanc , attisant les braises toujours actives du racisme.

Cette complicité des grandes banques et des multinationales ne date pas d’hier, mais remonte aux belles heures du système d’apartheid quand elles ont permis à ce système de résister et survivre aux sanctions globales et obligatoires décidées par les Nations Unies dès 1977. Des liens secrets se sont établis et perdurent. Ce n’est pas un hasard , si BAE, l’entreprise britannique ou Thalès , l’entreprise française sont accusées dans l’énorme scandale des ventes d’armes , The Arm Deal , de1999. Ceux qui avaient vendu des armes à l’apartheid avaient bien l’intention d’en vendre aussi à la nouvelle Afrique du Sud , avec les mêmes acteurs de l’ombre.

Jacob Zuma doit comparaître en février prochain pour répondre de dizaine de chefs d’inculpation allant de la corruption, au racket et blanchiment d’argent. La Commission Zondo poursuit son travail d’investigation, tout comme les Hawks , l’unité spéciale de la police. Celle ci vient d’arrêter Bongani Bongo, un ancien ministre de Jacob Zuma , pour corruption. Il avait donné un chèque en blanc à un témoin lors d’un procès pour détournement de fonds concernant une entreprise publique. C’est une première qui pourrait être suivie par de nombreuses autres arrestations, selon Shamila Behoti, la Procureure générale.

En attendant de voir corrompus et corrupteurs devant les tribunaux, le dernier ouvrage de Mike Nicol, L’Agence, vous entraînera dans les coulisses de l’ère Zuma, où les règlements de compte entre anciens de la lutte et nouveaux dirigeants vous laisseront pantois. La référence au meurtre de Dulcie September assassinée à Paris en mars 1988, " un assassinat utile …ta tante était une cible. Elle savait trop de choses qui gênaient trop de gens", dit l’ancien espion allemand à Vickie, l’espionne d’aujourd’hui, montre combien le passé a du mal a passé au pays de Mandela.

Publié le vendredi 22 novembre 2019


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