Les élections générales en Afrique du Sud auront lieu le 8 mai 2019. Tous les partis politiques ont déposé leurs listes auprès de la commission électorale indépendante. La liste des candidats pour l’ANC, le parti au pouvoir, a soulevé bien des questions, même si les sondages le donne encore gagnant. Faute de mieux ?
Quand la liste a été rendue publique, la surprise a été grande d’y voir figurer des noms qui avaient défrayé la chronique par leurs liens avec la famille Gupta, leur incompétence notoire à la tête de ministères ou d’entreprises publiques et leur goût immodéré pour les enveloppes bien garnies ! Le secrétaire général de l’ANC à beau dire qu’aucune de ces personnes n’a encore été condamnée et que la présomption d’innocence vaut pour tout le monde, voter pour eux n’a rien d’encourageant pour l’avenir.
Ces noms ont même choqué les anciens de l’ANC qui ont écrit une lettre ouverte pour mettre en garde le parti sur une éventuelle réaction négative des électeurs. On peut y lire : « Si des personnes de l’ANC ont été associées à des actes de corruption, les ont autorisés ou n’ont pris aucune mesure pour y mettre fin, et qu’elles sont autorisées à se présenter pour une réélection le 8 mai 2019, qui peut dire comment ceux qui nous soutiennent vont voter cette fois ? ». Les témoignages « à faire dresser les cheveux sur la tête » devant la Commission Zondo chargée de faire la lumière sur la capture de l’Etat, s’ils peuvent faire éclater la vérité sur le pillage systématique des caisses de l’état, ne sont guère encourageants pour les électeurs.
La lettre fait aussi allusion à la dernière débâcle électorale en 2016 pour les élections municipales où l’ANC a perdu la direction de trois grandes métropoles : Johannesburg, Tshwane et Mandela Bay, parce que les électeurs de l’ANC ont boudé les urnes. Les signataires de la lettre exhortent ceux sur qui plane une forte présomption de malversation de se retirer volontairement de la liste ( certains l’ont déjà fait) « pour montrer votre engagement dans les valeurs de votre bien aimé Congrès national africain ».
Des habitants des townships, qui ont recours à la violence pour dénoncer les promesses non tenues et la gabegie des élus locaux, à la détérioration du système de santé, aux coupures de courant à répétition, le patience des électeurs est à bout et ils pourraient l’exprimer par une abstention massive pour le prochain scrutin.
Les derniers sondages donnent pourtant la majorité au parti au pouvoir, incontestablement grâce à la popularité de Cyril Ramaphosa. Selon les chiffres de la Commission électorale indépendante sur 57, 7 millions d’habitants, 26,7 millions sont inscrits sur les listes électorales. Près de 10 millions n’ont pas fait l’effort de s’inscrire sur les listes et ce sont les jeunes qui montrent le moins d’intérêt pour les élections car ils n’ont plus confiance dans ceux qui cherchent à gagner leur suffrage.
Si la population noire reste majoritairement fidèle à l’ANC, la population blanche pourrait préférer voter ANC, plutôt que pour l’Alliance démocratique déchirée par les querelles internes ou le Parti des combattants de la liberté économique qui persiste dans son discours radical et trop souvent raciste. Le vote des électeurs blancs permettrait à l’ANC de garder la direction de la province du Gauteng, le poumon économique du pays.
Les sondages donnent 61% des voix à l’ANC, 18% à l’Alliance démocratique (DA), en perte de vitesse, et 10% au Parti des combattants de la liberté économique. Mais ces chiffres n’ont de valeur qu’à la condition que les électeurs se déplacent pour voter et personne ne peut encore mesurer le poids de l’abstention. Il semblerait qu’au bout de 25 ans de démocratie, les électeurs sud-africains ne fassent plus confiance à la démocratie électorale.
Publié le mercredi 20 mars 2019
© RENAPAS
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