Cette semaine sud africaine aura été celle des surenchères. Alors que l’ANC connaît la crise, aussi bien interne qu’externe, la plus dévastatrice de son existence, le gouvernement ne cesse de faire de la surenchère.
La Charte minière
C’est ainsi qu’il vient de proposer une réécriture de la Charte minière, texte fondamental, s’il en est, de l’économie et des relations entre l’Etat et le patronat du secteur le plus en pointe. C’est la troisième version de la charte, après celles de 2004 et ses amendements en 2014. Certes, une nouvelle version avait été annoncée en février dernier, au cours d’une conférence du secteur (Mining Indaba), mais personne ne s’attendait à une telle précipitation. « Dans un soudain et inattendu mouvement, le ministre des ressources minérales, Mosebenzi Zwane vient de rendre public un projet de Charte minière qui ne manquera pas de faire dresser les cheveux des patrons de mines et de la communauté toute entière » affirme le site du Business Day www.bdlive.co.za. Et c’est toujours la même menace sur la part du Black Economic Empowerment, c’est à dire la place des entreprises dites « noires » qui est l’objet du délit. Ce qui change est la dégradation de l’image de ces entreprises du BEE, qui, pendant les mandats du président Zuma, ne cessent d’afficher une gestion déplorable et sont le lieu de la corruption du régime. Dans le contexte actuel de crise de confiance, le fait que ce projet ait été rendu public sans la moindre concertation n’a fait qu’alourdir le climat. Les déclarations du ministre Zwane, sur le site spécialisé www.weeklymining.com, « le projet de charte n’est qu’une proposition, rien n’est encore gravé dans le marbre », n’ont pas apaisé les critiques.
La Commission Seriti et le Arms Deal
Autre annonce qui a fait bien du bruit et provoqué un grand scepticisme, la déclaration du juge Willie Seriti, dirigeant d’une commission d’enquête sur les soupçons de corruption pesant sur la signature d’un fabuleux achat d’armes discuté dans les derniers semaines de la présidence Mandela et signé au début de celle de Thabo Mbeki. Cette commission avait été mise en place en 2011 et son but était d’apporter la preuve de l’innocence ou de la culpabilité de Jacob Zuma, alors vice président de Thabo Mbeki. La déclaration du Juge Seriti, qui lave de tout soupçon de corruption les acteurs de la signature de ce contrat, tombe tellement à pic pour Jacob Zuma que bien peu l’ont prise au sérieux. « Arm’deal et les mains sales de la politique sud africaine » titre www.dailymaverick.co.za. Dans un long article très descriptif, l’auteur raconte par le menu le déroulement de ce contrat dont ont avait évalué à l’époque le montant de l’achat à 46 milliards de rands et dont on n’a jamais su le montant de la corruption. Autant dire que la principale raison du scepticisme à l’annonce du Juge Seriti est qu’elle tombe trop bien pour la réputation du président Zuma.
Le rugby
Enfin, la déclaration du ministre des sports a soulevé une immense émotion. Au nom de la « transformation », Fikile Mbalula a décidé d’abroger le privilège de jouer à l’international des quatre fédérations sportives, Athletics South Africa (ASA), Cricket South Africa (CSA), Netball South Africa (NSA) et surtout South African Rugby (SARU), qui a contribué à la célébrité sportive internationale de l’Afrique du sud. « La réalité est que cette interdiction ne fera pas une substantielle différence avec le statu quo actuel », déclare sur le site www.politicweb.co.za le responsable sportif de Democratic Alliance, alors qu’aucune de ces fédérations n’a proposé l’organisation ou le soutien à un grand événement décrit par le ministre ». « Cela montre, ajoute-t-il, comment l’ANC a changé. Plutôt que d’aider en premier lieu les plus vulnérables, ses dirigeants déploient un écran de fumée qui cache plus de 300 ans de colonialisme et d’apartheid ». De la part de Democratic Alliance et de l’idée que s’en fait l’ANC, c’est donner des verges pour se faire fouetter. Toute ces déclaration, dans une atmosphère de précipitation, témoignent d’un sentiment de panique qui gagne les rangs de l’entourage du président. Devant le « déficit de confiance », pour reprendre les termes du secrétaire général du parti Gwende Mantashe, dont souffre l’ANC, le pouvoir multiplie les décisions démagogiques.
Il faut noter que tout cela se passe avant le scrutin du 3 aout prochain, qui doit renouveler les dirigeants locaux. Ce sera un test majeur de l’audience du parti au pouvoir, un test qui a mal commencé, pour le lancement de cette campagne et de son manifeste, l’ANC n’a pas pu remplir le stade Nelson Mandela de Port Elisabeth dans le Cap Oriental. On appelait cette région il y a peu encore, le berceau de l’ANC. Cet événement a été vécu comme une gifle politique, alors que la semaine suivante, l’Alliance Démocratique lançait son manifeste dans un state de la province du Gauteng bien rempli.
Prochaine étape, le manifeste de Economic Freedom Fighter. Son dirigeant, Julius Malema, a été mis en cause dans la plupart des media à propos d’un entretien sur la chaîne TV El Djazeera, au cours duquel il a affirmé que son parti était prêt à se battre « les armes à la main » si l’ANC se rendait coupable de fraude électorale, comme « elle l’a fait au cours d’un scrutin précédent, dans le township d’Alexandra », précise-t-il.
Publié le mercredi 27 avril 2016
© RENAPAS
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