Dans un article publié par The South African Civil Society Information Service, le chercheur Frank Meintjies, à travers des exemples concrets, montre comment les pauvres élaborent des stratégies de survie qui sont à prendre en compte dans tout plan d’aide élaboré par les gouvernements ou les organisations caritatives.
Dans une étude menée à Eveton dans la province du Gauteng, sur 142 foyers, 36% survivent avec les seules allocations versées par le gouvernement, 72% ont un revenu inférieur à 1000 rands (environ 100 euros par mois) et seulement 4,1% des foyers ont un revenu supérieur à 3500 rands par mois. Pour la majorité des foyers (72%) la nourriture est tout juste suffisante en quantité, mais a une piètre valeur nutritionnelle. Nourrir la famille est la préoccupation majeure et l’achat de denrées absorbe la plus grosse part du revenu.
Des études menées dans le Kwazulu Natal et le Mpumalanga arrivent à des conclusions identiques : les pauvres doivent d’abord assurer leur survie alimentaire et pour y arriver, il faut faire preuve de débrouillardise, soit par des activités illégales (fabrication et vente de boissons alcoolisées illicites) ou des petits commerces comme salons de coiffure en plein air, vente de métal de récupération, etc.…
Dans le bidonville d’Orange Farm dans la province du Gauteng, une étude faite en 2010 montrait que les habitants qui avaient entrepris de cultiver un jardin pour se nourrir, dépensaient seulement 350 rands pour la nourriture au lieu de 650 rands pour celles qui ne pratiquaient pas ce genre d’activité. Le chercheur trouvait étonnant que cette activité de survie ne soit pas plus répandue.
La Banque de développement d’Afrique du Sud a tiré la sonnette d’alarme devant la forte augmentation des prix des produits alimentaires et des études menées par cette institution concluaient que soit les gens mangeaient moins, mangeaient des produits de mauvaise qualité nutritive, avaient recours à l’aide des voisins, soit dans le pire des cas allaient le ventre vide.
Cette situation catastrophique a un impact multiforme sur la vie ou plutôt la survie de ces communautés pauvres.
Le premier effet de la pauvreté est de soumettre ceux qui en souffrent à un stress permanent et de les isoler au sein de leur communauté. Le fait d’être privé de revenus ne leur permet plus d’alimenter par des versements réguliers « la banque » de la communauté et ainsi de les exclure. Cette exclusion du groupe entraîne des réactions violentes au sin de la famille, violence dont les femmes sont les premières victimes.
Le second effet est de rendre ces pauvres encore plus vulnérables à la violence, la criminalité, à l’instabilité et la perte de confiance. Un phénomène qui touche les jeunes sans travail , sans argent, sans avenir.
Toutefois un facteur positif émerge de cette situation, c’est la capacité de résilience qui évite la catastrophe complète et permet à ces populations de faire face grâce à diverses stratégies de survie. Pour certains, la seule bouée de sauvetage est l’allocation sociale versée par le gouvernement et si les enfants peuvent aller à l’école gratuitement, si les soins de santé les plus élémentaires sont assurés, alors les chances de survie et de sortie de la pauvreté sont plus grandes.
Les études de cas montrent sans ambiguïté que ceux qui s’en sortent le mieux sont ceux qui bénéficient d’une aide sociale à laquelle ils ajoutent les revenus « des petits boulot » et autres stratégies de survie. Ce qui bat en brèche l’approche néolibérale qui fait des coupes sombres dans les budgets sociaux. Le revenu des pauvres ne se calcule pas seulement selon le revenu « d’un emploi », qu’ils n’ont pas la plupart du temps, mais aussi par toutes ces activités de solidarité et d’entre-aide au sein de la communauté.
L’auteur de l’article en déduit que le gouvernement pour améliorer la vie des communautés pauvres doit prendre en compte toutes les stratégies de survie et ne pas les détruire en prenant des initiatives qui ne sont pas en phase avec les besoins réels exprimés par la communauté pauvre. Lutter contre la pauvreté, c’est d’abord écouter les pauvres et élaborer avec eux des stratégies pour sortir de la pauvreté.
Plus d'informations : sacsis
Publié le jeudi 26 septembre 2013
© RENAPAS
© RENAPAS
Pour nous contacter
Conception du site : AB
Site réalisé sous SPIP