Dans le dernier numéro de Umzebenzi, Jeremy Cronin essaie d’y voir plus clair dans la polémique que Trevor Manuel a soulevé en disant que l’apartheid n’était pas responsable de tout ce qui ne va pas aujourd’hui en Afrique du Sud. En utilisant, avec beaucoup de malice, l’actualité de la mort de la championne du libéralisme, il fouille le passé tragique de son pays sans excuser les erreurs des dirigeants depuis 1994.
En suivant le discours de Trevor Manuel devant une assemblée de hauts fonctionnaires, Jeremy Cronin reprend exactement ce qu’il a dit « qu’a vraiment dit le Camarade Trevor ? A-t-il exonéré le régime d’apartheid ? A-t-il déclaré que l’héritage de ce dernier avait disparu depuis longtemps ? Bien au contraire, il a dit : « Sans un gouvernement fort et efficace, nous ne serons pas capables de renverser les effets de l’apartheid sur l’égalité des chances pour tous les Sud-Africains, en particulier pour ceux qui ont été historiquement désavantagés. Les marchés à eux seuls ne transformeront pas des siècles de domination et d’oppression ».
L’auteur insiste sur cette dernière phrase et revisite l’histoire du pays. « L’apartheid mis en place il y a plus de 40 ans, à la suite de la victoire du Parti national (1948) avait été précédé par des siècles de colonisation et de génocide ethnique et à partir de la moitié du 19eme siècle, par un siècle d’industrialisation capitaliste qui a mis en place la loi sur les pass, le travail migrant forcé, les réserves de main d’œuvre indigène, les dortoirs pour les mineurs et d’autres formes de ségrégation urbaine raciale.
« Le système mis en place par Verwoerd s’est construit sur ces bases et à peaufiner ses fondements coloniaux, semi coloniaux et ségrégationniste. Si nous devons nommer des coupables, alors avec Verwoerd nous devons inscrire sur cette liste noire Shepstone, Milner, Cecil Rhodes, Barney Barnato, la famille Oppenheimer et tous leurs semblables ».
Mais Jeremy Cronin réfute le mot de « responsable » pour l’apartheid ou bien maintenant pour l’Etat. On ne peut pas utiliser l’apartheid comme bouc émissaire pour cacher les échecs et erreurs commises depuis près de 20 ans, ni accuser en bloc les fonctionnaires, les ministres et le gouvernement . « Au lieu de cela, nous devons assumer une responsabilité active et collective pour transformer notre pays, et pour cela nous avons besoin de comprendre l’impact du système colonial, semi colonial et de l’apartheid sur notre passé et notre présent ».
Au milieu des années 1990, le gouvernement sud-africain au lieu de transformer son corps de fonctionnaires a adopté une vision thatchérienne du service public en procédant à une déprofessionnalisation des secteurs clé du service public. « Cette approche mécaniquement appliquée pour réformer le service public en Afrique du Sud a eu des conséquences désastreuses … Selon le credo thatchérien « du nouveau service public » les instituts de formation des maîtres, les écoles d’infirmières ont été fermées et l’état a privatisé à tour de bras ».
Pour Jeremy Cronin, il ne s’agit pas de faire endosser les échecs et erreurs des vingt ans de gouvernement démocratique à l’apartheid, au Gear, au camarade Manuel Trevor ou à la Baronne Thatcher, mais bien d’avoir un œil critique pour faire un bon diagnostic des problèmes et tenter d’y remédier.
Et le Camarade Cronin finit sa contribution par cette question. « Après tout , il y a peu de chance qu’un gouvernement de droite qui a autrefois soutenu avec efficacité le régime d’apartheid critique l’héritage de la Baronne Thatcher, n’est-ce pas ? »
Plus d'informations : umzebenzi on line
Publié le mardi 16 avril 2013
© RENAPAS
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