Ces dernières semaines, une vague de grèves sans précédent submerge l’Afrique du Sud . Après les grèves des mineurs qui n’en finissent pas, les ouvriers agricoles de la région du Cap ont manifesté leur colère. Toutes ces grèves qualifiées de « sauvages » ont un seul but : dénoncer des salaires trop bas et des conditions de travail épouvantables.
Pour les mineurs d’Amplats il n’est pas question de reprendre le travail, « plutôt mourir », sans obtenir le salaire de 16000 rands mensuels qu’ils réclament. Ils rejettent toutes les autres propositions de la direction qu’ils considèrent comme une aumône. La direction a licencié 12000 mineurs et affirme qu’il lui est impossible de répondre aux demandes des mineurs sous peine de faillite.
Même scénario à des milliers de kilomètres de la ceinture de platine pour les ouvriers agricoles de la région du Cap. Ils veulent un salaire150 rands par jour, soit le double de leur salaire actuel. Les exploitants agricoles refusent en criant à la faillite et veulent bien aller jusqu’à 81 rands par jour, plus que le salaire minimum légal affirment-ils. Pour le moment la situation est bloquée et la grève risque de s’étendre à d’autres régions.
Ce qui semble clair, c’est que tous les mécanismes de régulation, de négociations légales sont incapables de résoudre la question des bas salaires, du travail intérimaire et précaire, des conditions de travail épouvantables qui sont toujours le lot des mineurs et des travailleurs agricoles, deux secteurs clés de l’économie sud-africaine
Pourtant ce ne sont pas les lois et les institutions qui régissent les rapports entre le monde du travail et le patronat , le « Big Business », qui manquent . Depuis 1994 la loi sur les relations au travail (Lra), la loi sur les conditions de base de l’emploi, les institutions comme le Conseil national sur l’économie, le développement et le travail (Nedlac), la Commission pour la conciliation, la médiation et l’arbitrage (Ccma) sont censées agir au mieux pour préserver la paix sociale. Une bonne intention du gouvernement pour donner aux travailleurs noirs des droits dont ils étaient privés au temps de l’apartheid.
Toutefois les partenaires sociaux n’avaient pas le même objectif en tête au moment des discussions, les grandes entreprises, le« Big Business » voulait une plus grande flexibilité du travail , le moins possible d’intervention de l’état et le moins de protection sociale possible et imposer un système de négociations salariales centralisées. De son côté, le Cosatu voulait que l’état légifère et protège au mieux les travailleurs en imposant aussi un système centralisé de négociations salariales.
Le compromis fut un « partenariat social » qui permettait le recours à la Ccma en cas de conflit et le recours à la grève « légale » décidée par le syndicat. Pour que ces mécanismes fonctionnent et ces lois soient appliquées, les syndicats formèrent des délégués syndicaux compétents et payés pour siéger à la table des négociations. Tout cela les a éloignés de leur base et de la réalité concrète du monde du travail. Quant au Big Business, il a préféré investir en bourse à Londres ou ailleurs à la recherche de bénéfices juteux au lieu d’investir sur place pour former les travailleurs et améliorer les conditions de travail.
Le résultat est désastreux : le chômage s’envole, autour des 40% de la population active, le travail précaire s’amplifie, les salaires sont en berne, le coût de la vie augmente, le travailleur ordinaire ne peut plus boucler ses fins de mois et fait vivre avec son salaire plusieurs de ses proches au chômage : travailler plus pour gagner moins est devenu la norme de l’ouvrier sud-africain.
Les mécanismes de régulation ont failli et ce sont les grèves sauvages des mineurs et des ouvriers agricoles qui montrent au grand jour cette faillite. Les syndicats légaux , comme le puissant Num, le syndicat des mineurs, sont désavoués par les travailleurs. Des sondages montrent que dans leur majorité les salariés syndiqués ne sont pas satisfaits des procédures de négociations, mais acceptent les résultats plus par disciple que par conviction. Les grèves sauvages risquent de s’étendre à d’autres secteurs de l’économie et seront sans nul doute au centre des discussions de la conférence nationale de l’Anc en décembre prochain.
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Publié le mardi 13 novembre 2012
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