Après le choc des images de la fusillade à Marikana, l’expression de la douleur de toute une nation devant cette tragédie, la presse, les analystes essaient de comprendre pourquoi on est arrivé à une telle violence et qui porte la responsabilité de ce drame qui va peser lourd dans l’avenir politique et économique du pays.
Dans un éditorial cinglant, le Business Day pointe du doigt la lourde responsabilité de la direction de Lonmin : « Si le Pdg de la mine , Roger Phillimore n’est pas en en route pour l’Afrique du Sud ce vendredi, il doit avoir honte …ou bien comme le reste de l’Europe est-il en vacances ? » L’absence de responsables de Lonmin au moment du drame n’est qu’un des griefs formulé. L’éditorialiste reproche à Lonmin de ne pas avoir su régler la question des augmentations de salaires qui remonte à plusieurs mois. Et dans un conflit social de cette ampleur, la direction doit être présente et jouer sa partition dans la résolution du conflit.`
Le Daily Maverick ne dit pas autre chose quand il écrit que les responsables du Num, ne pouvaient pas régler ce conflit qui n’était pas le leur le leur et que « la question aurait du être résolue conjointement par la direction de Lonmin, la police de la province et les responsables politiques de la province. Ce qui était un conflit social local a pris des proportions beaucoup plus importantes ».
Le Num aussi accuse la direction de Lomin d’avoir pris le conflit à la légère depuis le mois de février 2012 et d’avoir unilatéralement réglé la question des salaires en dehors de tous les accords collectifs en accordant à certaines catégories, en particulier celle des foreurs, une allocation de 250 à 750 rands par mois en ignorant les autres catégories de mineurs.
Le Num va encore plus loin en accusant la Chambre des mines et BHP Billiton d’avoir aidé à la création du syndicat rival Amcu. Les dirigeants d’Amcu, d’anciens syndiqués du Num, ont alors fait de la surenchère en réclamant 300% d’augmentation ! Quant Lonmin a refusé de discuter cette proposition et a fait machine arrière, la grève illégale s’est mise en route pour mener droit au drame de ce jeudi noir.
Le Num accuse la police de ne pas avoir fait son travail alors que des individus suspects avaient été identifiés parmi les grévistes dès mercredi et qu’aucune interpellation n’a eu lieu. « Les gens rassemblés sur la colline sont des suspects, mais ils n’ont pas été fouillés, arrêtés ou dispersés. Que peut faire un syndicaliste dans une telle situation ? » demande un responsable du Num appelé au dernier moment pour parler aux grévistes qui l’ont accueilli par des jets de pierre.
Cette inaction de la police avant le drame soulève une question importante : pourquoi a-t-elle laissé les grévistes venir avec des armes traditionnelles machettes et sagaies ? Pourquoi aucun responsable politique n’est intervenu pour tenter de calmer le jeu. Alors que la tension montait aucun responsable politique n’a pris la parole, ni est venu sur les lieux. Un silence qui pose beaucoup de questions.
Cette grève et son dénouement tragique vont marquer la vie politique, sociale et économique de tout le pays. L’alliance tripartite dont le syndicat Cosatu fait partie est dans une impasse. Le syndicat a perdu de vue sa préoccupation première qui est la qualité des conditions de travail et les salaires de ses adhérents pour se livrer à une course aux postes politiques. Plus grave, l’élite du pays semble déconnectée des réalités vécues par la grande masse des sud-africains pauvres, marginalisés et désespérés de voir s’améliorer leurs vie de tous les jours.
Ces pauvres laissés pour compte, ce sont aussi les mineurs qui ont suivi le nouveau syndicat qui a fait des promesses mirobolantes à des hommes illettrés, encore sensibles aux traditions coutumières de la sorcellerie. La présence des sangomas (sorciers) et des armes traditionnelles sur la colline avant l’assaut par les forces de police attestent de ces croyances à l’invincibilité.
Une enquête est ouverte pour tenter de savoir ce qui s’est passé et où sont les responsabilités. Mais quelles que soient les conclusions, il est certain que rien ne sera plus comme avant pour les syndicats et les relations avec le pouvoir. Pour le Président Zuma, la tragédie de Marikana est un nouveau défi, et non des moindre, à relever.
Publié le samedi 18 août 2012
© RENAPAS
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