Quand le Président De Klerk est monté à la tribune pour l’ouverture du Parlement ce 2 fevrier 1990 et qu’il a commencé son discours, le monde entier a retenu son souffle et le cours de l’histoire s’est accéléré quand il a prononcé ces paroles « les mesures qui ont été décidées sont les suivantes : l’interdiction du Congrès national africain, du Congrès Panafricain, du Parti communiste sud-africain et d’autres organisations est abrogée ».
Puis il a continué en annonçant la levée de toute une série de mesures d’urgence qui faisaient du pays une vaste prison depuis la proclamation de l’état d’urgence en 1985. Et il a enfin prononcé la phrase que tout le monde attendait « Je souhaite dire clairement que le gouvernement a pris la ferme décision de libérer Monsieur Mandela sans condition. Je veux sérieusement que cette question soit tranchée sans délai. Le gouvernement prendra une décision sur la date de sa libération".
Tous ceux qui ont vécu ces moments se rappellent la liesse qui a envahi tout le pays et le triomphal « nous avons gagné » de Trevor Manuel qui s’exprimait pour l’ANC. F. W De Klerk avait pourtant la réputation d’être un conservateur, mais un journaliste qui se désolait de son arrivée au pouvoir en Septembre 1989 se rappelle qu’un membre du gouvernement lui avait glissé à l’oreille « De Klerk est conservateur, mais c’est avant tout un démocrate ». Son discours du 2 février et la décision de négocier avec l’ennemi de toujours en étaient la preuve évidente.
FW De Klerk dans un article du Timeslive revient sur les motivations de sa décision en précisant d’emblée que, plus que les hommes politiques, ce sont les circonstances qui déterminent le cours de l’histoire, et les circonstances étaient réunies pour qu’il « saute par la fenêtre ».
La population blanche, en particulier les Afrikaners refusaient absolument le principe du suffrage universel et toute négociation avec l’Anc. Ils craignaient par-dessus tout l’influence des communistes très nombreux à la direction de l’Anc et de sa branche armée Umkhonto weSizwe. La guerre froide faisait des ravages dans les pays voisins, en particulier en Angola, où l’armée sud-africaine avait essuyé de cuisants revers contre les troupes cubaines. Tout renforçait leur haine du communisme.
Mais le gouvernement prenait acte de l’échec de sa « politique de développement séparé », du fait que 78% de la population noire ne pouvaient pas vivre sur 13% du territoire, que la population blanche n’était majoritaire dans aucune zone géographique et que de plus en plus de Noirs, d’Indiens et de Métis rejetaient cette politique.
L’affrontement entre les forces de sécurité et les militants du mouvement de libération était arrivé à un stade où aucune victoire militaire n’était envisageable, sauf à pratiquer la politique de la terre brûlée. Dès 1986 des contacts discrets avaient été pris entre l’Anc et le gouvernement pour arriver à trouver une solution négociée.
Les sanctions imposées par l’Onu, même si elles étaient loin d’être strictement appliquées, avaient lourdement affecté l’économie sud-africaine et isolé le régime. L’évolution de la société blanche de plus en plus urbanisée et éduquée, plus ouverte sur le monde, plus critique vis-à-vis du mode de vie sud-africain a modifié leur idéologie. « Ils ne partageaient plus le nationalisme effréné de leurs parents et grands parents »
Sur la scène internationale, des événements importants modifiaient la donne. Les accords de Nkomati pour le retrait des troupes cubaines d’Angola, l’application de la résolution 435 sur l’indépendance de la Namibie et surtout la chute du mur de Berlin à l’automne 1989 ouvraient la voie à une solution négociée en Afrique du Sud.
« Nous n’avons pas hésité » écrit De Klerk qui conclut par ces mots « le 2 février 1990, moins de cinq mois après mon arrivée au pouvoir, nous avons sauté par la fenêtre et nous avons atterri finalement dans un pays bien, bien meilleur ».
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Publié le mardi 2 février 2010
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