L’Afrique du Sud est selon sa constitution une nation démocratique, unie, non raciale et non-sexiste. Construire une nation sur cette base constitutionnelle progressiste hardie a permis des avancées considérables depuis 1994, mais construire une société qui ne fonctionne plus sur des critères racistes se révèle une tâche plus difficile que prévue. Les réactions racistes, les comportements racistes, les insultes racistes et les crimes racistes sont toujours le lot quotidien de la nation arc-en-ciel.
Le monde rural reste un monde qui fonctionne toujours sur des bases racistes. Les ouvriers agricoles noirs sont toujours la cible d’actes racistes particulièrement violents. Trop de fermiers blancs continuent de se comporter en maître absolu sur leur personnel et certains n’hésitent pas à commettre des actes criminels. De multiples procès sont en cours contre des fermiers blancs qui ont tiré, lâcher leurs chiens sur leurs ouvriers noirs ou les ont battus et chassés, eux et leurs familles, de leur logement sur l’exploitation où ils ont vécu pendant des années.
Le monde du travail n’est pas en reste et les syndicats dénoncent de multiples actes racistes dans les entreprises qui vont de l’insulte à l’acte violent en passant par la discrimination dans le poste de travail et le salaire. Sans compter, l’indifférence parfois affichée pour les accidents du travail dans les mines quand la direction ne semble pas juger utile d’envoyer un représentant aux obsèques des mineurs morts, comme ce fut le cas récemment après la mort de 9 mineurs dans une mine appartenant à Impala Platinum.
Au niveau politique, les débats et les discussions dérapent parfois pour retomber dans l’ornière du racisme le plus ordinaire. Ainsi les récentes déclarations du Président de la Ligue de la jeunesse dont les dérapages verbaux font les choux gras de la presse. Le dernier en date est celui où il conteste le choix des ministres du gouvernement Zuma parce que celui-ci « n’est pas assez noir » et de dénoncer comme raciste le fait que beaucoup de ministres dans le secteur économique et financier sont blancs ou indiens. Ces affirmations ont suscité de très vifs commentaires, non seulement dans la presse mais de la part du Président Zuma, de responsables de l’Anc et de ses alliés, Sacp et Cosatu.
Blade Nzimande, Ministre de l’ensignement supérieur et secrétaire général du Sacp,a très vertement répliqué en dénonçant « le chauvinisme noir étriqué » et en demandant au direction des composantes de l’ alliance tripartite, Anc, Cosatu et Sacp de veiller « à déraciner ce chauvinisme noir étriqué » et en affirmant le soutien de son parti à tous les membres du gouvernement. Il met en garde avec vigueur contre toutes les attitudes racistes. « Alors que des attitudes racistes détestables persistent dans beaucoup d’endroits, souvent de manière agressive et parfois plus sournoise, et doivent être sans cesse combattues, son équivalent le chauvinisme noir étriqué, ne fait que reproduire et nourrir les mêmes attitudes. De telles tendances doivent être écrasées dans l’œuf comme elles l’ont toujours été dans l’histoire de l’Anc ».
Dans la publication hebdomadaire de l’Anc, le secrétaire de la Ligue des jeunes communistes, Beti Manamela, dans un commentaire sur la construction de la nation sud-africaine revient sur la question du racisme en Afrique du Sud. Il reprend les analyses théoriques « du colonialisme d’un type spécial » caractéristique de l’oppression coloniale dans son pays et revient sur l’objectif historique du mouvement de libération qui est la libération des plus opprimés mais aussi « ...de libérer la communauté blanche de l’idéologie fausse de la supériorité raciale... de libérer l’oppresseur’ .
La construction de la nation sud-africaine doit se faire avec toutes ses composantes historiques, culturelles, sociales, mais deux menaces mettent cette construction en danger : le racisme blanc et le chauvinisme noir et « il serait suicidaire de nier la présence du racisme dans notre société, mais encore plus dangereux pour atteindre l’unité nationale et la formation de la nation de nier l’existence d’un chauvinisme noir ». Et pour enfoncer le clou, Beti Manamela cite Nelson Mandela au procès de Rivonia « J’ai combattu la domination blanche et j’ai combattu la domination noire. Je chéris l’idéal d’une société démocratique et libre où tous nous pourrons vivre en harmonie et avec des chances égales. C’est un idéal pour lequel j’espère vivre et que j’espère atteindre. Mais s’il le faut, c’est un idéal « pour lequel je suis prêt à mourir ».
Pour la société sud-africaine où tous les actes de la vie ont été déterminés par la race, le danger est grand de céder à la facilité du racisme, ruinant ainsi tous les espoirs d’une société juste pour tous les Sud-Africains. Pour en finir avec ces réflexes mauvais, Buti Manamela exhorte les jeunes noirs à aller à la rencontre des jeunes blancs, à aller à la rencontre des indiens du Kwazulu-Natal, à la rencontre des jeunes métis de la province du Cap, à discuter avec eux.
Au cours d’une intervention à l’université de Johannesburg, pour célébrer le centenaire de la naissance de Yusuf Dadoo, un Indien, musulman, communiste, responsable du Congrès Indien, Blade Nzimane a rappelé qu’il était particulièrement important de noter que comme au temps de Yusuf Dadoo « la lutte contre le racisme et la discrimination de classe reste une question cruciale pour la liberté et la justice dans notre pays".
Plus d'informations : anc today
Publié le mardi 8 septembre 2009
© RENAPAS
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