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Afrique du Sud : croissance et emploi, la fin d’un conte de fée

Le rapport SWOP du département de sociologie du travail de l’université de Witwatersrand à Johannesburg vient de jeter un gros pavé dans la mare des illusions qui voulaient que la croissance soit la panacée à la création d’emplois et à la réduction de la pauvreté. Le rapport démontre qu’il n’en est rien, ni en Afrique du Sud, ni ailleurs dans le monde.

Cette étude intitulée « Rendre visibles, les invisibles » commandée par le ministère du travail fait un constat cruel. La croissance a entraîné une augmentation importante de la précarisation du travail et de la sous-traitance. En Afrique du Sud, on estime le nombre de travailleurs précaires à deux millions, mais ce chiffre pourrait être plus proche de 5 millions si on élargissait la définition du travail précaire. Selon Eddie Webster qui a dirigé l’étude on peut inclure dans cette catégorie toutes formes d’activités qui génèrent un revenu, et cette définition inclut la mendicité. Au total 40 % de la force de travail sud-africaine se trouvent dans la catégorie informelle, c’est -dire un travail sans garanties, sans protection sociale, sans perspective d’avancement.

Le rapport note qu’en dépit de l’amélioration des enquêtes et sondages dans le monde du travail, les autorités « sont incapables de mesurer la taille et la nature du travail informel que l’on trouve de plus en plus pratiqué au sein même des entreprises qui ont de plus en plus recours à la sous-traitance ».

Le rapport fait référence au concept des « deux économies » souvent cité par le Président Thabo Mbeki, l’économie formelle faisant référence aux emplois dans des entreprises modernes, avec des salaires décents, l’autre à toute une gamme d’emplois précaires dans de multiples secteurs d’activité. Mais le rapport apporte une précision importante et dérangeante : « la soi disante seconde économie est une composante intégrale de l’activité économique nationale totale plus qu’un simple appendice marginal et périphérique. Il est faux de dire que l’économie informelle n’est qu’une simple panoplie d’activité de survie réservée aux pauvres et aux défavorisés ».

L’étude a mis crûment en lumière l’importance du recours au travail contractuel précaire dans cinq branches d’activités : l’industrie minière ; la production et la distribution des boissons alcoolisées, un secteur dominé par Sab, les Brasseries sud-africaines ; l’industrie textile et l’habillement ; le recyclage des vieux papiers et le recyclage des vieux métaux. Ces analyses de cas montrent combien les secteurs formel et informel sont liés par le recours systématique à la sous-traitance et aux emplois contractuels.

Cette augmentation spectaculaire du travail informel, ces dix dernières années dans les pays industriels, est lié selon l’étude à la force des syndicats qui sont considérés comme des obstacles à l’accumulation du profit et à des groupes de pression bien déterminés à défendre les intérêts de leurs adhérents.

Les chercheurs ne pensent pas que la tendance puisse être renversée, mais ils ont fait une liste de recommandations pour limiter les effets des emplois informels sur les travailleurs en préconisant au gouvernement d’avoir une autre approche de la législation du travail en trouvant la juste mesure entre le trop de régulation qui a un effet dissuasif et le laissez faire qui menace les engagements du gouvernement à créer des emplois décents.

Le rapport recommande au gouvernement d’adopter une cadre de régulation pour assurer aux millions de travailleurs contractuels un emploi « décent » Il recommande aussi de mettre un terme au flot de marchandises qui sont fabriquées sans respecter les normes du travail « décent » et la mise hors la loi de ceux qui cassent le marché du travail en ayant recours à une main d’œuvre sans droits.

Le rapport a fait l’effet d’une bombe et la presse a publié quantité d’articles qui expriment surprise et indignation. On découvre à la lumière de ce rapport que des millions de travailleurs sont licenciés pour être à nouveau employés pour faire le même travail en étant moins payés, sans droits et sans garantie.

Le Ministre du travail a promis de bannir définitivement ce genre d’employeurs du monde du travail si l’Anc remporte les élections de 2009. Le Cosatu a qualifié ce genre d’emplois "d’esclavage et de traite des êtres humains et le reflet de la forme extrême du capitalisme sauvage ».

Le conte de fée de la croissance qui bénéficie à tous a tourné à la fable sordide des plus pauvres toujours plus pauvres et des riches toujours plus riches.

Plus d'informations : cosatu media monitor

Publié le vendredi 12 décembre 2008


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