A la veille de la commémoration du premier anniversaire de la mort de Nelson Mandela, le rapport 2014 du Baromètre de la réconciliation en Afrique du Sud intitulé "Reflecting on Reconciliation : Lessons from the Past, Prospects for the Future » montre que le racisme institutionnel du système d’apartheid a laissé des marques profondes dans la population sud-africaine et que la construction d’une identité nationale est un processus complexe.
Ce baromètre a été crée par l’Institut pour la Justice et la Réconciliation (IJR) en 2003 et mesure chaque année l’évolution des relations entre les citoyens sud-africains : quel chemin ils ont parcouru et quelle perception ils en ont. Il est clair que le chemin n’est pas linéaire : il y a des avancées mais aussi des reculs.
Le rapport annuel est basé sur une collecte d’entretiens individuels à partir d’un questionnaire national. En 2013, 1989 habitants des grandes villes et 1609 autres habitants ont participé aux entretiens.
La race reste un fort marqueur de l’identité des personnes interrogées, mais la méfiance envers l’autre est passé de 40% il y a dix ans à 30% aujourd’hui ce qui est interprété dans le rapport comme un mouvement vers une identité partagée qui intègre les différences, l’appartenance au pouvoir et les conflits plutôt qu’à une assimilation qui nie les différences.
Il y a plus d’échanges entre les Sud-Africains blancs et noirs, mais ces relations interraciales sont l’apanage des classes aisées, alors que les plus pauvres restent à l’écart et ce sentiment d’exclusion des plus pauvres semble plus fort aujourd’hui.
Kenneth Lukuko, un responsable de l’IJR, utilise cette image pour expliquer qu’il y a encore du chemin à faire vers la réconciliation qui permettra les transformations nécessaires de la société sud-africaine. « La personnalité de Nelson Mandela et sa capacité à pardonner, nous a fait croire que nous pouvions marcher sur l’eau. Maintenant qu’il est parti, nous nous rendons compte que les contradictions sont toujours là et que nous ferions bien de nous en préoccuper avec plus de sérieux et d’honnêteté pour vraiment nous réconcilier. Il faut que nous apprenions à nager et c’est très difficile ».
La mémoire du passé fait partie de la construction de cette identité partagée, mais il apparait que les Blancs sont ceux qui sont les plus prompts à l’oublier. A la question de savoir si l’apartheid était un crime contre l’humanité 53 % seulement de Blancs sont d’accord, contre 80% pour les Noirs, 77% pour les Indiens et 70% pour les Métis. D’une manière générale si 86,50% des Sud-africains considéraient l’apartheid comme un crime contre l’humanité en 2003, ils ne sont plus que 76,4 % en 2013.
Pourtant, le rapport souligne que la mémoire du caractère oppressif de l’apartheid encourage les citoyens à prendre mieux en compte son héritage et renforce la volonté de vouloir transformer les relations au lieu de reproduire à l’identique des relations basées sur l’inégalité.
L’enseignement de l’histoire est un facteur déterminant pour comprendre le passé, en particulier pour que la population blanche prenne mieux en compte comment la seule couleur de la peau déterminait les privilèges. Pour le directeur de l’Institut « le racisme est une maladie qui peut détruire une société. Nous ne pouvons pas nous le permettre en Afrique du Sud ».
Ce rapport vient à point nommé pour rappeler que l’on n’efface pas en vingt ans, 350 ans de colonialisme, d’oppression et d’humiliation et qu’après avoir gravi une colline, on découvre qu’il y en a encore beaucoup d’autres à gravir.
Plus d'informations : IJR
Publié le jeudi 4 décembre 2014
© RENAPAS
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