L’affaire aura tenu en haleine l’opinion publique du monde entier pendant des mois. Rien des émotions de celui qui était dans le box des accusés n’a échappé aux caméras et aux téléspectateurs. Depuis sa mort, le 14 fevrier 2013, Reeva Steenkamp a été affublée du nom de « petite amie » du célèbre athlète, comme si sa mort était plus légère en utilisant cette expression qui évoque jeunesse, beauté et amours éphémères.
Le verdict est tombé : cinq ans de prison ferme pour celui dont le comportement a été qualifiée de « grossièrement négligent ». Les parents de la victime ont accepté le verdict, la mère de Reeva a déclaré « nous ne voulons pas de vengeance, mais une punition juste tenant compte de son invalidité » et son père a eu cette phrase pleine de retenue « seul Oscar sait si la punition est acceptable ».
Compte tenu du « cirque médiatique » autour de cette affaire qui n’est en fin de compte qu’une sordide affaire de violence domestique, la juge, Thokozile Masipa, a finalement prononcé un jugement raisonnable, en son âme et conscience, loin de toute idée de vengeance. La famille a dit qu’elle ne fera pas appel ; le procureur peut faire appel et exiger dix ans de prison. C’est ce que demande ceux qui trouvent que cinq ans de prison avec la probabilité de sortir bien avant n’est pas cher payé pour la vie d’une femme.
Oscar Pistorius doit-il servir de bouc émissaire pour tous les meurtres de femmes, les violences faites aux femmes ? Une peine plus longue rendra-t-elle justice aux sept femmes tuées chaque jour, aux 152 femmes violées chaque jour, aux femmes battues obligées de trouver refuge dans un centre d’accueil avec leurs enfants ? Une femme sur quatre admet avoir été victime de violence domestique au moins une fois dans sa vie. Cette violence qui se passe derrière des portes closes est le drame de la société sud-africaine toute entière.
Cette violence n’est pas nouvelle : au temps de l’apartheid aucune statistique ne se préoccupait de tenir les comptes ordinaires de la vie et de la mort de la majorité de la population noire. Aujourd’hui il existe des lois pour garantir les droits fondamentaux à la vie. La difficulté est de les mettre en pratique et de les faire appliquer dans une société qui croit encore que la loi du plus fort, armes à la main, est la meilleure façon de préserver l’ordre patriarcal.
La mort de Reeva Steenkemp pourra-t-elle amener à faire évoluer les rapports de pouvoir entre les hommes et les femmes ? Cette question est la seule qui vaille d’être posée, une fois remballés micros et caméras.
Jacqueline Dérens photo Saartjie Baartman Centre for Women and Children
Publié le mercredi 22 octobre 2014
© RENAPAS
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