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Afrikaners : des réfugiés d’un type spécial

Ils sont 59 et jamais des réfugiés n’ont suscité autant d’intérêt. Il est vrai qu’ils sont blancs, qu’ils ont été triés sur le volet et qu’ils ont emporté autant de bagages qu’ils voulaient, leur avion étant spécialement affrété pour eux seuls et qu’ils ont été accueillis par Christopher Landau, secrétaire d’Etat adjoint, et Troy Edgard, secrétaire adjoint à la sécurité intérieure des Etats-Unis d’Amérique.

Ces 59 réfugiés ont été choisis avec soin sur place par des experts américains de la Mission South Africa parmi les quelques 8200 candidats au départ pour s’assurer « qu’ils ne poseraient aucun défi à notre sécurité nationale et qu’ils seront facilement assimilés dans notre pays » a précisé Chris Landau en réponse à un journaliste. Et d’ajouter que le récit des “ violences qu’ils ont dû affronter en Afrique du Sud était absolument déchirant ».

On ne sait pas grand-chose de ces réfugiés choisis avec soin sauf qu’ils sont de nationalité sud-africaine, afrikaner et qu’ils sont victimes de discrimination. Beaucoup d’observateurs font remarquer que c’est la première fois depuis la fin de la seconde guerre mondiale que les USA envoient une mission pour aller chercher et trouver « des réfugiés ». Trump n’hésite pas à parler de génocide des fermiers blancs même si les statistiques de la police sud-africaine sont loin de justifier l’emploi de ce terme. Sur 19 000 assassinats enregistrés entre janvier et septembre 2024, 50 avaient été commis dans des fermes, mais les victimes n’étaient pas toutes de race blanche car on dénombre aussi des ouvriers agricoles et des employés à la sécurité.

Mais pour Trump et son gouvernement peu importe les chiffres car il s’agit d’une entreprise idéologique qui puise ses racines dans le national-christianisme des fondateurs du système d’apartheid, eux-mêmes inspirés des théories nazies de la suprématie de la race blanche chrétienne, qui avait tenté par les lois de l’apartheid et la création des bantoustans qui servaient de réservoirs de main d’œuvre noire pour l’élite blanche, de faire de l’Afrique du Sud, la terre promise de la race blanche. L’arrivée d’une démocratie non-raciale et non sexiste dont le gouvernement a été élu par des élections au suffrage universel, une personne, une voix, est venue casser ce rêve d’une nation blanche.

L’image de la nation arc-en-ciel a fait oublier la volonté de revanche de ceux qui avaient pour héros Eugène Terre-Blanche et la création d’Orania, cet îlot incongru où seuls ont droit d’accès et de résidence les purs Afrikaners, a été traité à la légère par les médias qui y voyaient un exotisme un brin désuet. La droite nationaliste sud-africaine n’est plus aussi virulente qu’elle a pu l’être, mais elle est sur ses gardes et les discours racistes justifient ses milices et ses camps d’entrainement. L’actuel dirigeant du mouvement AWB, de feu Terre-Blanche, est très clair « nous avons changé de stratégie depuis 1994 et nous n’avons pas l’intention d’être les agresseurs. Notre but principal est de protéger, pas de créer l’anarchie ».

Les liens de l’extrême droite sud-africaine et suédoise ne datent pas d’aujourd’hui. Le meurtre en 1986 d’Olaf Palme n’a jamais été élucidé et la piste de l’extrême droite avait vite été abandonnée par la police suédoise. Un Suédois d’extrême droite, Jonas Nilson, s’est installé en Afrique du Sud et a établi des liens avec ces Sud-Africains blancs nostalgiques de l’ordre ancien et défenseurs de « la cause boer » dénonçant « le génocide blanc » en cours. Un oligarque russe Vladimir Poluboyarenko, après une visite avec quelques richissimes russes nationalistes en Afrique du Sud, avait offert aux fermiers blancs de quitter leur « fatherland » pour une nouvelle « motherland » en Russie autour de la ville de Stavropol. Affirmer que les fermiers blancs sont victimes « d’un nettoyage ethnique », ne fait que reprendre les valeurs conservatrices défendues par Vladimir Poutine dénonçant un Occident tolérant au point de devenir « sans genre et stérile ».

Un documentaire tourné en Afrique du Sud avec le soutien d’un étudiant en théologie, Willem Petzer, défenseur auto-proclamé de « mon peuple Boer » a été diffusé en Russie pour illustrer « la campagne de sauvagerie et de prédation des Noirs sud-africains contre les blancs ». Petzer est un grand admirateur du philosophe Alexander Dugin et de sa « Fourth Political theory » qui démontre que la théorie des droits de l’homme n’est que foutaise idéologique qui anéantit le concept d’état-nation et de citoyenneté et les droits humains, un prétexte pour ouvrir la porte aux hordes de migrants, à l’assaut du monde civilisé.

Tous ces défenseurs de la race blanche, de l’homme blanc, ont des liens avec toute l’extrême droite mondialisée. En Grande –Bretagne avec Katie Hopkins, au Canada avec Lauren Southern ou Faith Goldy qui affirme que l’unité dans la diversité que proclame la Constitution sud-africaine n’est qu’un leurre et la nation arc-en-ciel un hochet pour les naïfs alors que « les blancs vulnérables sont massacrés chaque jour à cause de la couleur de leur peau ». Et il faut ajouter le site polonais Visegrad24.com qui dénonce l’Afrique du Sud, un pays “obsédé” par la race et qui discrimine ses citoyens blancs.

Toutes les études et statistiques montrent pourtant que les Afrikaners vivent plutôt bien mais la réalité n’intéresse pas l’extrême droite et son thuriféraire bien connu, Steve Bannon qui a tissé sa toile de la Belgique, avec le parti nationaliste flamand et le mouvement Die Suidlanders, jusqu’en Italie, au Danemark et en Suède, sans oublier le Brésil dont l’ex président Jair Bolsonaro était qualifié « de patriote brésilien".

Les déclarations tonitruantes de Donald Trump et sa stratégie de la sidération ne sont que la façade d’une réalité beaucoup plus dangereuse : un réseau mondial de soutien idéologique, politique et financier à la pureté de la race blanche en utilisant pour justification la cause du peuple boer.

Publié le lundi 19 mai 2025


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