Bathabile Dlamini, ancienne ministre du Développent social a été inculpée de parjure le 9 mars 2022. Elle était en charge du versement de l’aide sociale à 17 millions de personnes en Afrique du Sud. Elle était aussi présidente de la Ligue des femmes de l’ANC qui va être dissoute. La dérive d’une femme de pouvoir.
C’est la première fois qu’un tribunal condamne un haut responsable de l’état. La ministre a menti sous serment devant le tribunal en affirmant que la débâcle du versement de l’aide sociale ne dépendait pas de ses services alors que la vie quotidienne de millions de personnes dépendaient de ce versement.
L’affaire remonte à 2017 quand le scandale éclata de la possibilité du non versement de cette aide à partir du 1er avril, aux millions de personnes qui attendent avec angoisse et espoir le versement de cette allocation. En 2014 , Sassa , l’agence nationale pour la sécurité sociale, département du ministère de Bathabile Dlamini, avait cédé le droit de verser les prestations sociales à une entreprise privée américaine Cash Paymaster Services(CPS) .En 2014, la cession de ce droit à CPS avait été jugée illégale par la Cour constitutionnelle qui avait découvert des irrégularités dans l’attribution de ce marché public à une entreprise privée. La cour constitutionnelle avait donné comme date butoir le 1er avril 2017 à Sassa et au ministère pour trouver une autre solution. Rien n’avait été fait pour trouver un successeur à CPS.
CPS ne faisait pas ce travail bénévolement, mais entendait bien empocher des bénéfices en « vendant » des produits inutiles au plus pauvres des Sud-africains. CPS détenaient toutes les données personnelles concernant les bénéficiaires de l’aide sociale et ses agents avaient pour mission de les convaincre de recevoir « des offres commerciales » pour contracter un emprunt, pour payer la facture du téléphone, de l’électricité, etc … Tout cela se faisait par SMS ou appel téléphonique et si la personne contactée donnait son accord, c’était un jeu d’enfant de récupérer toutes ses données personnelles pour prélever les factures et déduire les montants de l’aide sociale. Les personnes interrogées par des journalistes ont dit ne plus se souvenir d’avoir donné leur accord ou bien elles avaient donné leur accord pour la période d’essai gratuite qui est reconduite sans qu’on leur demande leur consentement. Toutes ces pratiques sont bien sûr interdites. Voir article Comment faire du gras sur le dos des pauvres, 14 mars 2017.
Pendant que les pauvres se faisaient plumer, la Ministre recevait un salaire mensuel de 110 000 rands, plus une pension de 40 000 rands comme ancienne députée et 70 000 Rands comme présidente de la Ligue des femmes. Avec un revenu de 220 000 rands par mois, elle avait eu le toupet de dire aux bénéficiaires de l’aide sociale que l’on pouvait très bien vivre avec 753 rands par mois !
Bathabile Dlamini n’est pas une inconnue de la justice. En 2006, alors députée de l’ANC, elle avait été condamnée pour fraude à une amende de 12000 rands et cinq ans de prison avec sursis. Mais comme elle l’avait humblement admis « tout le monde a des cadavres dans son placard » et puis interrogée sur sa défaillante gestion de son ministère elle avait admis qu’elle « n’était pas une experte sur ces questions ».
En tant que présidente de la Ligue des femmes de l’ANC elle avait soutenu Jacob Zuma à la présidence de l’ANC en 2009 et aussi pendant son procès pour viol. La Ligue va être dissoute, elle ne représente plus rien pour la défense des droits des femmes. Sa dernière conférence remonte à 2015 et elle n’a plus aucune influence positive pour les femmes dans l’opinion publique.
Pourtant la Ligue des femmes de l ‘ANC (ANCWL) a joué un rôle essentiel dans la lutte de libération et la lutte pour les droits des femmes en Afrique du Sud. La liste est longue des femmes militantes emprisonnées, torturées et assassinées pour la liberté de leur pays et leur propre liberté de femmes. Pour n’en citer qu’une, on pense à Dulcie September assassinée à Paris le 29 mars 1988. Projeté ce 29 mars à Arcueil, le film Murder in Paris consacrée à la vie de Dulcie September retrace son engagement et ouvre des pistes pour répondre à la question qui taraude sa famille et ses ami.e.s : pourquoi elle ?
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