Le rapport Zondo ou comment piller les caisses de l’Etat

Le juge Zondo, président de la commission ayant pour mission de faire la clarté sur le pillage des caisses de l’Afrique du Sud par la famille Gupta, la complicité de cabinets internationaux de conseil et d’audit et la corruption endémique, vient de publier son deuxième rapport, tout aussi explosif que le premier, à quelques jours du discours présidentiel sur l’état de la nation.

De l’utilisation d’un aéroport militaire pour accueillir les invités au mariage d’une fille Gupta, à la banqueroute de presque toutes les entreprises d’état (State Owned Entreprises), la liste n’en finit pas de dénoncer les coupables et le rapport de démonter les mécanismes mis en œuvre en toute illégalité depuis des années. ` Le pillage des ressources de l’état est devenu un système bien rodé avec l’arrivée de Jacob Zuma à la présidence du pays en 2009. Après avoir refusé de céder au choix du président pour la nomination des responsables des quelques 700 SOEs, Barbara Hogan, ministre des entreprises publiques, fut remplacée par un homme à l’échine plus souple, Malusi Gigaba. Ce dernier n’a pas hésité un instant à nommer les proches de Zuma et de la famille Gupta à des postes de responsabilité qui leur assuraient un enrichissement personnel rapide. De la résidence des Guptas, surnommée, Saxonwold Shebeen, l’argent coulait à flot. Eskom, Denel, Prasa, Transnet, l’énergie, l’armement, les chemins de fer, les transports, les entreprises au cœur de l’économie sud-africaine ont vite croulé sous les dettes, incapables de répondre aux besoins du pays.

La commission ne se contente pas de démonter le mécanisme et de donner les noms des individus qui ont crée un réseau permettant d’enrichir les amis et connaissances, mais formule aussi des recommandations pour interdire aux ministres de nommer les responsables des entreprises d’état et d’établir une commission indépendante pour ces nominations, elle propose aussi une peine de 20 ans de prison ou une amende de 200 millions de rands aux voleurs de biens publics. « Ces violations potentielles peuvent aller du Président de la République qui détient une grande partie de la richesse nationale ou qui a accès à cette richesse de manière non autorisée au simple fonctionnaire qui suspend un collègue par vengeance ou envie ».

Une journaliste d’investigation qui a enquêté sur #Guptaleaks se déclare frappée par le fait que ce système ne date pas d’hier, mais aussi par son ampleur. Avant les Guptas il y avait un certain niveau de corruption acceptable « ce n’est pas si grave de détourner un ou deux pour cents »mais les détournements ont pris une toute autre ampleur avec l’arrivée des Guptas. « La capture de l’Etat ne commence pas avec un contrat, cela commence avec la nomination du ministre, qui nomme le PDG de l’entreprise, et puis qui accepte le conseil d’administration, si bien qu’au moment où le contrat commence, tout un système est mis en place ».

Tout cet ingénieux système se faisait aussi avec l’aide de cabinets de renommée internationale de conseil et d’audit. Bell Pottinger, KPMG, Mc Kinsey et Bain & C° ont été pris la main dans le sac. Bain & C° a réussi à jouer un rôle essentiel au sein de l’inspection des impôts pour aider à l’évasion fiscale et vider les caisses de l’état. Tout cet argent détourné a ruiné le pays, empêché toute redistribution des richesses au profit de ceux qui en ont le plus besoin : les jeunes, les femmes et les chômeurs.

Le dernier et troisième rapport de la Commission Zondo sera publié à la fin du mois, mais le 10 février, le Président Ramaphosa doit faire le traditionnel discours à la nation qui marque la rentrée parlementaire et politique. Va-t-il annoncer des inculpations que l’opinion publique attend et qui donneraient corps à ses promesses de lutte contre la corruption ? L’aube nouvelle promise a bien du mal à se lever.

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