Le retour inattendu de Brian Molefe à la tête de la compagnie nationale d’électricité provoque colère et stupéfaction dans la classe politique sud-africaine. Des partis d’opposition aux alliés de l’Anc et du parti au pouvoir même, tout le monde dénonce « la blague » qui pourrait coûter cher à Jacob Zuma.
A la suite de la publication du rapport de la médiatrice de la république State of Capture où le nom de Brian Molefe était cité en bonne place parmi les amis de la famille Gupta, il avait démissionné de la direction d’Eskom en novembre 2016. En pleurs, il avait affirmé son innocence en dépit de ses 58 appels téléphoniques à Ajay Gupta et sa présence fréquente aux abords de la résidence de la célèbre famille indienne. Il avait, sans rire, affirmé qu’il fréquentait un shebeen voisin, sauf que ce genre d’estaminet n’est pas fréquent dans les quartiers chics de Johannesburg.
Surnommé « Mister Fix It », il avait réussi à améliorer le fonctionnement et la situation d’Eskom en évitant les coupures et délestages de courant qui était devenu le cauchemar des usagers et des entreprises. Mais il était aussi connu pour son soutien au projet gouvernemental de production énergétique nucléaire, un achat insensé de plusieurs centrales nucléaires, et d’avoir favorisé les entreprises appartenant aux Guptas pour l’approvisionnement en charbon des centrales thermiques existantes.
Aussitôt connu son retour aux manettes d’Eskom, une avalanche de réactions outrées a accueilli cette décision
La centrale syndicale Cosatu « rejette et dénonce la décision du conseil d’administration d’Eskom de réinstaller Brian Molefe comme PDG d’Eskom. Cette décision indique à quel point la corruption est devenue la norme dans ce pays et le niveau de détérioration de notre gouvernement et de nos entreprises publiques ».
Pour le Num, le syndicat des mineurs, le retour de Brian Molefe à la tête d’Eskom montre à quel point cette entreprise n’a plus de direction propre et le syndicat « attend une invitation en bonne et due forme de la part d’Eskom afin de pouvoir s’exprimer de manière appropriée sur cette plaisanterie ». La structure Jeunesse du Num « note avec consternation la réinstallation de Brian Molefe comme PDG d’Eskom » et rappelle que « Brian Molefe doit s’expliquer sur les irrégularités concernant les accords de fourniture en charbon conclus avec Tegeta, une entreprise appartenant aux Guptas, mentionnés dans le rapport State of Capture de la médiatrice de la République.
Par la voix de son porte-parole, l’Anc « condamne la décision malheureuse et irréfléchie du conseil d’administration d’Eskom de réinstaller Brian Molefe comme directeur exécutif ». Les soupçons de corruption qui pèsent sur Brian Molefe n’ont pas encore été éclaircis, aussi pour l’Anc cette décision ne peux qu’exacerber la colère de l’opinion publique devant « ce qui semble être une approche sans panache et bien légère d’en finir une fois pour toute avec la corruption de la part du gouvernement ».
Le Sacp, le Parti communiste, est le plus virulent dans la condamnation de cette re-nomination et n’y va pas par quatre chemins en qualifiant Brian Molefe de « bon messager des Guptas ». Le secrétaire adjoint du parti communiste a fait la déclaration suivante : « Brian Molefe fait partie de cet agenda destructeur, quand il a été nommé au parlement l’idée était de faire de lui le prochain ministre des finances, et quand ça n’a pas marché, il devait revenir à la direction d’Eskom pour accomplir sa mission qui est de s’assurer que les Guptas continuent à se remplir les poches avec la fourniture de charbon par la compagnie Tageta ». Le fils du président Zuma, Duduzane, a des intérêts dans cette entreprise et dans bien d’autres appartenant à la famille Gupta. « Il est clair que Zuma est impliqué dans cette affaire pour que, quoiqu’il arrive à Molefe, l’enrichissement des Guptas et de son fils soit assuré ».
Les partis d’opposition veulent porter l’affaire devant la justice, les organisations comme Save South Africa veulent organiser des manifestations dans tout le pays. Les explications de Lynne Brown, la ministre des entreprises publiques, auront du mal à calmer le jeu car dire que « c’est une meilleure solution (de le renommer) que de payer une pension de 30 millions de rands à Mr Molefe » a été accueilli comme la meilleure blague du moment.
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