Le système d’apartheid en imposant des lieux de résidence selon les races a marqué l’espace géographique de l’Afrique du Sud. La création des townships et des bantoustans imposait aux populations noires, métisses ou indiennes des trajets longs, onéreux et dangereux pour se rendre au travail dans les zones blanches. Aujourd’hui permettre à la population de se déplacer dans de bonnes conditions est un enjeu majeur de l’amélioration des conditions de vie de la population, mais aussi un atout pour le développement économique du pays.
Le boycott des bus contre l’oppression et l’exploitation a été un des multiples aspects de la lutte contre le système d’apartheid et une des façons de saper l’économie qui reposait sur l’exploitation de la masse des travailleurs noirs. En retour, le régime a complètement délaissé le service public des transports dès les années 1960, laissant les taxis collectifs privés assurer le transport des habitants des townships.
Les trains n’étaient pas mieux lotis, les wagons surchargés transportaient dans des conditions d’insécurité permanente des milliers de voyageurs qui risquaient leur vie chaque jour en allant au travail. Les violents affrontements entre le parti zoulou Inkhata Freedom Party et les militants de l’ANC entre 1985 et 1994 dans les trains ont définitivement discrédité ce mode de transport auprès d’une population trop souvent prise dans les tirs croisés des deux camps.
Depuis l’arrivée au pouvoir de l’ANC, la question des transports comme celles du logement, de la santé, de l’éducation et de la sécurité est une priorité du gouvernement. Mais la question n’est pas simple car en plus des financements nécessaires à trouver, la réflexion sur des moyens de transport efficaces, confortables et accessibles à une population pauvre suscite de vifs débats, d’autant plus que l’échéance de la Coupe du monde de football approche et que l’Afrique du Sud va devoir assurer le transport des milliers de touristes attendus.
La rénovation des lignes de bus existantes est une des options, mais elle se révèle peu efficace et coûteuse. L’intensité du trafic routier aux heures de ponte est telle qu’il est impossible pour les bus de respecter un horaire. Cette question de la congestion des routes en particulier sur la route qui relie les centres économiques et politiques que sont Johannesburg et Tshwane est récurrente sans trouver de solution. La création d’une bourgeoisie et d’une classe moyenne noire ne fait qu’aggraver le problème car le prestige social que procure la possession d’une automobile fonctionne à plein chez une population avide d’avoir accès à des produits de consommation dont elle a longtemps été privée.
La mise en place d’un système de bus rapides urbains, appelé Rea Vaya-BRT pour assurer dans un premier temps, la liaison Johannesburg Soweto prévue pour le 1er septembre est une nouvelle approche pour rendre les transports publics plus attractifs et améliorer la situation sur les routes. L’idée est d’avoir un système intégré de transports, c’est-à-dire intégrant bus, trains et taxis, dans toute la province du Gauteng pour relier toutes les townships au centre ville.
Les plus hostiles au projet sont les chauffeurs de taxis qui ont prévu de faire grève le jour du lancement de Rea Vaya -BRT. La promesse faite par les autorités provinciales d échanger leurs licences de taxi contre des actions dans Rea Vaya -BRT ne les a pas du tout convaincus et ils craignent que leur activité ne soit condamnée à long terme si des transports publics ponctuels, rapides, confortables et bon marché sont mis en place dans toutes les grandes villes.
Les taxis collectifs font partie du paysage urbain sud-africain pour le meilleur et pour le pire. Un bon chauffeur de taxi peut vous emmener n’importe où pour un prix modique, mais les compagnies de taxis fonctionnent comme des gangs qui ont leur territoire et le défendent à coups de revolver. Elles tiennent en otage des voyageurs dépendants de ce mode de transport et ont peu de considération pour leur confort ou leur sécurité. La guerre des taxis est un sujet familier dans la presse et les victimes innocentes de ces rivalités ou de la désinvolture des compagnies pour la sécurité des voyageurs se comptent par centaines chaque année.
Des liaisons rapides ferroviaires sont aussi nécessaires pour relier les grandes villes. Le Gautrain veut répondre à ce besoin. Mais sa construction est le sujet d’âpres polémiques depuis le début. Pour certains cette liaison est inutile et coûteuse. La construction a été décidée en septembre 2006 et confiée à un consortium, Bombela. Gautrain doit relier Johannesburg à Tshwane selon deux axes : un nord-sud et un ouest-est. Les adversaires au projet lui reprochent de n’être destiné qu’à une clientèle huppée et d’hommes d’affaires qui ont besoin de joindre rapidement les centres d’affaires, leurs hôtels luxueux à Sandton et l’aéroport international OR Tambo. Le coût fait aussi grincé des dents, Bombela cherche 25 millions de rands supplémentaires pour accélérer la construction afin que la première tranche (Tshwane-OR.Tambo airport) soit en fonction un mois avant le début de la coupe du monde de football.
La coupe du monde de football est un catalyseur pour essayer de trouver les meilleures solutions rapidement au problème des transports. L’espoir de voir des milliers de touristes débarquer en Afrique du Sud tout au long de l’année 2010, avec un pic entre juin et juillet ne doit pas être gâché par une offre insuffisante de transports publics. Mais ce que les Sud- africains espèrent avant tout c’est avoir des transports corrects après la fête et pour longtemps.
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